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Les tribulations de la Tribu
12 mars 2012

Il était un allaitement...

Je vous ai raconté ici, la naissance de FilleAinée. Elle fut à l'origine de nombreuses questions, interrogations, puis recherches et choix différents afin de me sentir enfin respectée en tant que femme, future maman et jeune accouchée. Il me semble à présent judicieux de vous raconter aussi nos débuts d'allaitement qui, eux aussi, furent à l'origine de grandes remises en cause, et de choix pas toujours compris par mon entourage.

Le premier...et seul (!) bébé que j'ai vu être allaité avant de devenir mère à mon tour, fut mon jeune frère lorsque j'avais à peine 13 ans. J'en ai gardé de jolies images en tête mais aussi des idées qui m'ont longtemps dérangées sans que je sache vraiment pourquoi : Un gros bébé (4.3kg), très demandeur, un allaitement toutes les 4h pas avant ni après, un bébé qui ne prend pas beaucoup de poids, un pédiatre qui dit à ma mère que son lait n'est pas assez riche et qu'elle doit donc manger plus riche. Je l'ai vu dévorer pour allaiter ce petit morfale qui ne grossissait toujours pas assez selon le doc, et du coup être au biberon après chaque tétées puis complètement sevré à 3 mois. A 13 ans, je n'avais pas grand chose à dire sur le sujet.

A 24 ans par contre, il était évident pour moi d'allaiter mon bébé. Mais à l'époque, comme pour tout ce qui concerne la naissance, l'accouchement... je ne me posais pas encore des tonnes de questions et je me disais que "oui, je veux allaiter mon bébé mais que si ça ne fonctionne pas bien, je ne me prendrai pas la tête avec ça, les laits en poudre sont bien fait !"

 12 ans après quand j'y repense, je me dis que j'étais bien naïve et innocente...

Et puis FilleAinée a pris sa première tétée en salle de naissance. Elle a ensuite beaucoup dormis...et encore téter, re-dormis, re-téter...et je me suis aperçue qu'elle me faisait un peu mal. Elle me pinçait le sein. Ce n'était pas encore hyper douloureux, mais pas forcément agréable non plus. Des le premier jour, les SF de la maternité m'ont donné une crème à mettre sur mes mamelons mais à enlever avant chaque tétée. Honnêtement, je ne peux pas dire que l'effet fut très positif. Devoir l'enlever en plus avant la tétée m'a semblé particulièrement peu agréable.

Mon bébé est né un dimanche, l'après midi les visites s'enchainent, bébé dort, elle tète à peine. J'ai une super pèche...je pense l'éffet des hormones de la naissance est encore bien présent.

Le lundi matin, premiers soins, premier bain, première pesée, sage femme pour moi, soins de l'épisiotomie...Puis visites l'après midi, encore. Je suis fière de mon bébé, elle est si belle ! Tout le monde s'extasie dessus, Elle ressemble beaucoup à son père. Elle dort...encore...tète...un peu

Mardi matin, au passage de la pédiatre, elle m'annonce que le frein de la langue de mon bébé est trop court, qu'elle va donc le couper. Aussitôt dit, aussitôt fait, sans aucune explication, elle prend une paire de ciseaux stériles dans une poche, ouvre la bouche de mon bébé qui dormait et lui coupe. Au Revoir Madame, à dans 2 jours. Monsieur mon Ex et moi même sommes resté bouche-bée. Heureusement, FilleAinée ne s'est même pas réveillée. En fait, je commence à me dire que mon bébé dort vraiment beaucoup. Elle perd du poids. Soit, ok, c'est normal parait il mais on approche quand même déjà des 10% ; la puéricultrice m'informe bien qu'elle a déjà perdu un peu plus de 300g et qu'il faut qu'elle remonte si je veux sortir ......moi qui pensais sortir de l'hôpital rapidement... je suis déçue d'entendre la puéricultrice me dire que si mon bébé perd encore du poids, ce ne sera pas possible et qu'il faudra la compléter. La question bête du jour "bah avec quoi on complète un bébé ?"  "et bien avec des biberons madame !" ... question bête, réponse évidente.

Mardi soir, j'ai toujours mal aux seins, mais j'y mets ma fille plus souvent. Je la stimule, je la réveil doucement mais sûrement...Je suis fatiguée, cette seconde nuit m'est difficile. J'appelle une puéricultrice pour qu'elle m'aide un peu à bien mettre ma fille au sein, j'ai en effet l'impression qu'elle n'est pas bien positionnée et que du coup elle tète mal... Sa seule réponse sera :"Si vous êtes fatiguée, je peux vous prendre votre bébé pour la nuit et vous le ramener demain matin après le biberon." (???!!!) Mais non ! ce n'est pas ce que je veux ! je veux juste un peu d'aide....Voyez ça avec l'équipe du matin madame, c'est eux qui s'occupent des mises au sein.

Bon, ok, je me débrouille comme je peux. Ma puce chouine pas mal, je dors peu, je la prend avec moi dans le lit, mais j'ai peur de la faire tomber.Je met une barrière et un traversin sur le coté pour qu'elle ne tombe pas et je la branche au sein. Elle me pince mais tète... Je n'ai toujours pas de montée de lait...

Mercredi matin, 6h, premiers passages des puéricultrices, sages femmes, femmes de ménage, le bain, la pesée, les soins divers pour ma fille, pour moi...elle a encore perdu du poids, non, Madame, vous ne sortez pas encore ce jour ! j'avoue que je suis déçue. J'ai envie de rentrer chez moi. Je suis fatiguée, il y a trop de bruits, trop de passage (j'ai une compagne de chambre qui a des visites toute la journée et un petit garçon de 2 ans assez... turbulant, qui reste là tout l'après midi). Une puéricultrice m'apporte quelques mini-biberons de lait ... je suis déçue, j'ai une forte sensation d'echec, j'hésite encore à lui donner. Et puis elle se réveille, elle réclame le sein... Je ne peux pas, j'ai tellement mal, les crevasses sont si douloureuses... à contre coeur je tente de lui donner un bib. Elle fait des grimaces avec sa bouche. Tétouille bizarrement, déglutie un peu, mais semble ne pas savoir quoi faire avec cette tétine dans la bouche. Je n'insiste pas plus, ma puce me regarde, rote un bon coup et recrache le peu de lait qu'elle a avalé et se remet à pleurer. J'ai compris. Je la remets au sein. J'alterne. Toute la journée. Je serre les dents, mes crevasses sont à la limite de saigner mais je suis bien décidée à sortir donc seule solution, que mon bébé prenne du poids et donc tète bien et beaucoup ! Je suis une têtue. Parfois même butée...autant utiliser cette caractéristique afin de parvenir à mon but. Sortir avec mon bébé de cet hôpital dans lequel je ne me sens vraiment pas aidée ni écoutée.

Ma fille passera donc cette nuit à téter, moi à pleurer de douleur... mais au petit matin, je suis la première à demander la pesée ! +30g ! Ho Yeah ! La puéricultrice est une autre jeune femme. Elle est gentille, semble compatissante. Elle fera venir la pédiatre afin qu'elle me signe notre autorisation de sortie dans la matinée. J'appel Monsieur afin de l'informer de venir pour l'heure de sortie prévue avec le lit-auto. Ce qui est fou, c'est que je n'ai toujours pas ma montée de lait. Mes seins sont souples, absolument pas tendus...je trouve cela étrange et pourtant... pas tant que ça. Je veux juste être au calme, chez moi, tranquille. Juste avant le déjeuné, je vais voir la pédiatre pour récupérer les ordonnances de sortie, elle m'en donne une avec une prescription de lait en me disant que "c'est le lait que votre enfant à reçu durant son séjour à la maternité". Je ne sais pas si ce pédiatre plaisante ou est sérieux. Je prends l'ordonnance en lui disant simplement que ce n'est pas possible puisqu'elle est au sein et que je ne l'ai pas quittée depuis sa naissance. Ça ne l'a pas frappé ni déstabilisé, il s'est contenté de me dire que je n'aurais qu'à m'en servir dans quelques semaines quand je sèvrerais mon bébé.

1h avant l'heure prévue de sortie. Je suis sur le pied de guerre. Toutes nos affaires sont prêtes et rangées, mon bébé ne lâche plus mon sein, je serre les dents, mais je suis trop heureuse de sortir !

Être à la maison, chez moi, dans mon cocon avec mon bébé me semble bien étrange. Après les allés et venus incessants du personnel de la maternité, les visites tous les après midi, les soins, les examens... le calme de la maison me semble presque étrange. Ma fille dort comme une bienheureuse. Je vais me coucher après avoir posé ma puce dans son petit lit, dans sa chambre. 2h plus tard, je me réveille avec les seins comme des obus. Je crois qu'il n'y a pas photo, ma montée de lait est bien là. Je suis hyper heureuse d'entendre quelques vagissements venant de la chambre d'à coté. Son père me la ramène et je la mets de suite au sein. C'est douloureux, encore, mais au moins, cette fois je l'entends téter pour de bon et le moins que je puisse dire c'est qu'elle semble se régaler car elle n'arrête plus !

Au cours des jours suivants, je vois la puéricultrice de la PMI. Elle s'y connaît un peu en allaitement, me conseil sur les positions possibles, une autre crème pour aider à cicatriser les crevasses... franchement, je n'éprouve pas vraiment de soulagement. Le pédiatre que je rencontre me conseille de la passer au biberon "pour me soulager les seins"... mais bien sur, encore une solution de facilité... pfff... je suis déçue, je dois me l'avouer. Chaque tétée devient une épreuve, j'y vais à reculons, mes deux seins sont vraiment très douloureux, mes mamelons hyper sensible et rien ne les soulage. Je lis tous les bouquins qui me tombent sous la main parlant d'allaitement et je ne trouve pas de solution. Je suis vraiment à deux doigts d'arrêter. Je tente une dernière piste. La puéricultrice de la PMI m'a donné le numéro de téléphone d'une femme qui est en lien avec une association de soutien à l'allaitement*. Je l'appelle. Je me dis qu'au point où j'en suis, ça ne peut pas être pire. Je tombe sur une jeune femme très gentille, très à l'écoute à qui je raconte ma vie durant une bonne heure ! j'en viens même à pleurer au téléphone ! Vive la descente des hormones ! Elle est adorable mais pas d'une grande aide. tous ses conseils ont déjà été testés...mais pas approuvés par mes seins. Toutefois, elle me dit qu'une réunion de mamans qui allaitent se tiendra dans 2 jours. Elle me donne l'adresse et l'heure. Une personne qui s'y connaît vraiment en allaitement pourra regarder si ma puce n'aurait pas un problème de succion ou de position...chose qui ne semble pas forcément évidente à voir au téléphone, c'est sur.

Lundi matin. Ma fille a 4 semaines. Je sors de chez moi seule avec elle pour la première fois pour aller à cette réunion. Lit auto à installer, voiture, trajet, châssis de poussette à ouvrir seule, lit auto à installer dessus, sac à langer à prendre...j'ai l'impression de partir en voyage !

J'arrive dans une salle où déjà quelques jeunes mamans sont installées avec leurs bébés.... enfin, il n'y a pas que des bébés pour tout dire, il y a des petits de plusieurs âges différents, des enfants qui courent... c'est déjà très joyeux...et bruyant. Je pose mes affaires à coté d'une des chaises, mon bébé dort, je vais me présenter à une femme d'un certain age. C'est Martine, l'animatrice du groupe. Elle me met à l'aise de suite, me présente une ou deux autres mamans de jeunes enfants, le fonctionnement du groupe, de la bibliothèque étalée devant moi.... La réunion commence quelques minutes plus tard avec quelques mamans de plus. Je n'ai jamais vu une telle concentration de bébé allaités au mètre carré !!! Même des bébés qui n'en sont plus pour tout dire, cela me surprend... Tour de "tapis de jeux" chacune se présente, présente son bébé et son questionnement ou ses soucis. Les échangent commencent par les problèmes des mamans dans leur allaitement. Je commence à entrevoir que je ne suis pas la seule à être un peu perdue, voir même à la limite d'arrêter. Les mots de Martine, des autres mamans, leurs conseils sont rassurant, apaisant. La discussion se poursuit quand j'entend mon bébé qui commence à réclamer. Martine laisser la parole à une jeune femme qui semble être en formation avec elle et vient s'installer à mes cotés pour observer ma fille au sein. Il ne lui a fallu que quelques secondes pour s'appercevoir qu'elle ne tète pas bien. Sa lèvre inférieur est rentrée dans sa bouche au lieu d'englober tout le mamelon. Martine me conseil de passer doucement mon petit doigt dans le coin de sa lèvre pour la faire ressortir. FilleAinée arrête de téter et remet sa lèvre "dedans". Il faudra 2-3 succions brisées avant qu'elle ne laisse sa petite lèvre bien en place.... et instantanément, la tétée ne fait plus mal... enfin presque car les crevasses sont encore là quand même.... mais la douleur de succion est radicalement différente, beaucoup plus supportable. J'en ai les larmes aux yeux, mais cette fois de soulagement. Dans la foulée, Martine verra que ma fille a des petites taches blanches dans la bouche : du muguet !!! Là encore, ceci explique cela. Les douleurs, les crevasses, mes larmes... Il me suffira d'aller voir mon pédiatre pour qu'il nous prescrive un traitement et de soigner mes mamelons crevassés. C'était si simple que j'avais peine à y croire vraiment...et pourtant !

La réunion se poursuit gentiement, les expériences de chacune sont très interessantes. En une seule réunion de 2h j'apprends autant qu'en plusieurs mois de lectures sur le sujet ! La suite ? Un petit repas pris en commun avec ce que chacune a amené... je botte en touche, je ne savais pas, je n'ai rien amené... ce n'est pas grave, il y a largement assez pour une bouche de plus. J'apprécie ce petit moment de partage supplémentaire. Il y a un peu moins de monde, les échanges sont un peu plus personnels et des affinités se créent entre mamans.

Il ne m'a pas fallu attendre 12 années pour savoir que cette réunion a sauvé mon allaitement...et par la même occasion, celui des enfants que j'ai eu plus tard. FilleAinée a été allaité jusqu'à 3 ans et 9 mois...

* Cette association, c'est La Leche League

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